Dans ce petit article, je voudrais vous parler d’un fait incroyable pour notre petite patrie, c’est-à-dire de l’existence, dans le passé, d’une Armée Valdôtaine, que le Pays d’Aoste a bien voulu créer en 1536 pour la défense du Pays. Milice officiellement reconnue par le duc de Savoie en 1548 et entretenue depuis lors pendant près de deux siècles.Entre février et mars du 1536, la Vallée d’Aoste a vécu une des périodes les plus cruciales de son histoire. Le roi de France François I avait envahi, à partir de l’année précédente, les territoires de la Savoie. Après avoir occupé la Savoie, les Français, s’étaient emparé aussi du Piémont et ils menaçaient d’entrer dans le Duché d’Aoste. Celui-ci se trouvait en effet entouré par des ennemis, parce qu’au-delà du Grand-Saint-Bernard, les Luthériens étaient en train de conquérir de nouvelles terres pour la cause protestante. Ces jours-là, Calvin qui, selon la légende, attendait caché près d’Aoste, la décision de l’Assemblée des Trois États réunie dans un verger du couvent Saint-François, fut obligé de s’enfuir en Valais après que la foule s’était prononcée en faveur du catholicisme. La Réforme, qui cherchait à détacher le pays religieux de Rome et, sans doute, à incorporer le pays politique à la Confédération, perdit la partie. En ce temps-là le pays s’administrait par lui-même avec l’Assemblée des Trois États, une Cour des Connaissances, son Hôtel des Monnaies et ses Milices. Les trois principales autorités au niveau local étaient le Bailli, fonctionnaire qui représentait les ducs de Savoie dans le Duché, le gouverneur de la Région et l’Évêque d’Aoste, dont le pouvoir s’étendait bien au-delà de la sphère spirituelle.Suite à ces événements drastiques, le 29 février 1536, l’Assemblée des Trois États, alarmée à cause de la perte de Genève et de l’invasion du Vaud par les Bernois ″leuteranos″, tiendra son assemblée dans le jardin du Couvent de Saint-François d’Aoste. Elle – contre une minorité aguerrie qui prétendait l’annexion aux cantons suisses et au calvinisme – répondra positivement aux trois questions posées par le bailli Matthieu de Lostan : Voulez-vous rester fidèles à l’Église Catholique et à la Maison de Savoie et défendre, contre toute attaque, la Patria Augustana ? J’ouvre une petite réflexion – parenthèse : on peut dire qu’à l’occasion du passage de Calvin – toute question religieuse mise à part – les Valdôtains ont manqué ″le coche″!… Canton Suisse ! Liberté ! Paix ! Franc-or ! Sagesse perpétuelle…Je continue… Prises ces décisions, on devait créer les conditions pour les rendre fonctionnelles. Cet acte de dévotion à la Maison de Savoie devait être poursuivi au plus vite et à la manière du Pays, et le 7 de mars, c’est-à-dire quelques jours plus tard, l’Assemblée des Trois États décide la création du Conseil des Commis, c’est-à-dire la création d’une junte plus restreinte que l’Assemblée, capable de gérer avec une plus grande agilité les structures de celle qui allait devenir une entité territoriale indépendante, presque un État dans l’État. Cet acte, qui indique d’une forme d’esprit d’indépendance et qui va créer un nouveau système, non plus purement féodal, a été ratifiée en 1570 par le duc Emmanuel-Philibert.Avec l’impossibilité de pouvoir compter sur les institutions savoyardes, il était nécessaire de doter le Pays d’Aoste d’un représentant officiel, le secrétaire des États. En 1549 à Aoste on battait de la monnaie dans la maison des nobles Tollen, appelée aujourd’hui Hôtel des Monnaies. C’est alors que fut prise une des plus rapides et importantes décisions de la part du Conseil des Commis, pour chercher à défendre la population locale des invasions et des méfaits qu’apportaient avec elles les armées étrangères qui allaient vers la Vallée du Po, ou en revenaient, pour s’engager à des batailles de domination et qui ne semblaient jamais finir. Brusquement les cols internationaux, depuis toujours carrefour de passage des hommes et de transport de marchandises et de cultures, devinrent les points faibles de la chaîne alpine et la Vallée d’Aoste fut obligée à se renfermer dans elle-même.Dans le but de préserver le Pays des horreurs de la guerre, le Conseil des Commis ne se fit point scrupule de stipuler avec la France, avec le préalable consentement du Souverain, de vrais traités de neutralité. Mais, vous imaginez aujourd’hui la Région Autonome qui ratifie un semblable traité d’égal à égal avec la France où l’Italie!?!?!?Le premier accord fut signé le 4 avril 1537. Les clauses établirent que : « les Français n’entreront point dans la Vallée ; de leur côté, les Valdôtains s’engagent à empêcher le passage des Suisses, des Espagnols, des Allemands, des Piémontais. Les droits de péage sont supprimés entre le Val d’Aoste, la Savoye et la France; les habitants de ces trois pays pourront circuler les uns chez les autres et commercer sans entrave. Six mois étaient à peine écoulés, que déjà le traité était mis à l’épreuve. Le Cardinal de Tournon, au nom de son Roi François Ieur, demandait le passage dans la Vallée, pour une armée française qui devait se rendre en Piémont. L’assemblée Générale réunie le 31 octobre, présent Mgr Gazin, rejeta nettement la demande, en hommage au traité récemment conclu. Ce refus n’irrita point le Cardinal. ; au contraire : celui-ci prorogea le traité de neutralité, qui fut ensuite renouvelé les années 1538, 1542, 1552, 1554, 1556 et 1558 ». c’est ainsi que l’Abbé Henry nous informe dans son Histoire de la Vallée d’Aoste.Belle audace !! Il fallait donc se mettre à l’abri de ces demandes de passage et de cette manie de traverser le Pays et qui n’étaient pas toutes pacifiques. Voilà la raison qui a conduit le Conseil des Commis à créer une organisation militaire autonome.« La petite Armée donc disposait le Val d’Aoste dépendait exclusivement du Conseil des Commis ; elle se divisait en deux Bataillons, appelés respectivement ʺbataillon d’en hautʺ (Haute Vallée) et ʺbataillon d’en basʺ (Basse Vallée), ayant chacun à sa tête un Colonel. Deux lieutenants-colonels subalternes commandaient à leur tour à douze capitaines de Compagnies, celles de : Donnas, Challand, la Cité, Quart, Cly, Gignod, Avise, Valdigne, Cogne et de Revers(c’est-à-dire des terres situées sur la rive droite de la Doire, de Fénis à Aymavilles), déployant chacune sa bannière. Un officier appelé Sergent major se chargeait des manœuvres ».Tous les châteaux, compris ceux qui étaient déjà abandonnées depuis longtemps, furent à nouveau fortifiés. En 1581 Charles-Emmanuel confirma solennellement les franchises du Duché d’Aoste, lors d’un séjour officiel dans la Vallée, du 5 au 10 septembre. À cette occasion il participa aussi à la procession de la Saint-Grat et passa en revue les troupes de la Milice du Pays, qu’il réorganisa et dota de plus amples prérogatives.Toutes ces Institutions, Conseil des Commis, Coutumier, Armée Autonome, donatif… ont disparu en 1773, lorsque le roi Victor-Amédée III a aboli les Libertés Valdôtaines et donc l’ancienne organisation autonome du Pays.Voilà un détail curieux, qui devrait intéresser les Valdôtains attachés à l’Autonomie du Pays d’Aoste.Monsieur Claudio VicariPour Pays d’Aoste Souverain
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